Bloavez mad au Gouezou, étrennes et piz...
Au mitan du XXème siècle, au Gouezou et dans les Monts d’Arrée en général, impossible de ne pas souvenir du Premier de l’An ! Les enfants n’avaient guère l’habitude de traîner le matin mais ce jour-là, il était encore moins question de songer à faire la grasse matinée ! Et les plaisirs commençaient dès le saut du lit. En effet, la coutume voulait qu’ils fassent la tournée des maisons voisines pour souhaiter à tous la Bonne Année : Bloavez Mad !
Ce n’était pas tant la présentation de ces vœux qui les motivait à sortir dans le froid du petit matin que les quelques gâteries que cela leur valait. Ils se voyaient offrir soit des bonbons, soit quelques carrés –voire une tablette !- de chocolat, quelques fois une orange et aussi quelques menues pièces de monnaie. Une fois la tournée terminée, les enfants comparaient, à l’aune de leur popularité et de leur habileté sociale, leurs « cadeaux », ce qui ne manquait pas d’attiser des jalousies, et de faire naître, parfois, des commentaires désobligeants sur certaines personnes jugées un peu « piz », c’est-à-dire pingres.
Puis, l’après-midi était consacré à la présentation des vœux aux aïeuls qui souvent vivaient alentours dans les hameaux des monts d’Arrée. Les familles s’y rendaient souvent à pied et s’y retrouvaient oncles et tantes, cousins et cousines autour des grands-parents et d’une collation aux allures de festin, assiette de charcuterie généreuse, beurre salé, crêpes de blé noir et de froment, lait frais et lait ribot et fars. Les familles ne revenaient jamais bien tard au Gouezou car la nuit tombait tôt et, en rentrant, il fallait s’occuper des bêtes, notamment des vaches qu’il fallait traire. Ces tâches accomplies, la journée n’était pas pour autant terminée. Vers sept ou huit heures du soir commençait la grande « virée » dans le village, cette fois pour tous les adultes qu’accompagnaient les enfants. Tous les voisins réunis passaient de maison en maison où charcuterie, gâteaux, biscuits, café et moult verres de vin rouge et rasade de « lambig » leur étaient servis. Au fil des heures, les esprits s’échauffaient, les rires fusaient tout comme quelques propos grivois. On imagine sans peine que le lendemain, certains avaient la tête lourde !
Au pays de la crêpe, nous conservons bien volontiers en 2018 cette tradition gourmande de crêpes brûlantes partagées sur fond de «Bloavez Mad » aussi tonitruants que chaleureux !